Les entrevues : Cédrik Pellerin

Salut Cédrik. T’es super gentil d’avoir accepté de jouer le jeu de l’entrevue avec moi. Et merci à ta mère de t’avoir permis d’être là, aujourd’hui.

J’aurais donc quelques petites questions à te poser. Sois sans craintes, ce sont des questions faciles et peut-être quelques-unes moins faciles. Mais c’est pas comme un test de mathématique. Si tu n’as pas envie de répondre, c’est ton choix, et je l’accepterai.

C’est parti !


Comment c’était, ta vie à Plessisville, quand tu vivais seule avec ta mère ?

« Euh… Avec maman, c’était bien. Maman est cool. Même si des fois, elle me tape sur les nerfs, mais c’est une maman, hein ? Et les mamans s’inquiètent toujours pour leurs enfants. Des fois j’aimerais qu’elle s’inquiète moins et qu’elle me fasse plus confiance.

Mais à l’école, j’sais pas, je m’y sentais pas bien. Les profs étaient corrects avec moi, mais pas plus que ça. Les autres élèves, eux, eh bien, j’sais pas quoi dire, je me sentais pas bien avec eux. Ils m’aimaient pas. On m’écoeurait souvent dans la cour de récréation. J’ai dû des fois me battre avec des gars plus vieux que moi, parce qu’ils arrêtaient pas de m’intimider. J’aime pas l’école. »

C’est quoi que tu aimes, toi ?

« J’aime les animaux, comme ma grand-mère vétérinaire. Et j’aime dessiner. Quand je dessine, je me sens bien. Je suis dans ma bulle et personne vient me déranger. »

Qu’est-ce que tu dessines ?

« Quand j’étais plus petit, je dessinais des insectes. Des papillons surtout. J’sais pas pourquoi, j’étais obsédé par les papillons. Puis j’ai commencé à dessiner les animaux de la clinique vétérinaire de mamie, quand je me faisais garder chez elle. C’était au début du primaire. Mes dessins étaient pas très beaux. Des lignes toutes croches, des animaux déformés. Mais mamie me disait que c’était bien, qu’il fallait commencer par là. Je comprenais pas trop ce qu’elle voulait dire.

Et maintenant, je dessine… J’sais pas trop comme l’expliquer. Ça vient tout seul. Ça me démange la main. Je dois prendre un crayon pis dessiner. Et le dessin se fait tout seul sur la page. J’y ai même pas pensé avant. Le dessin arrive, il arrive.. ».

C’est peut-être un don que tu as. Y as-tu pensé ?

« Un don ? Non, j’y ai jamais pensé. C’est quoi un don ? »

C’est un talent inné ou un talent que tu développes avec les années. C’est une aptitude naturelle pour quelque chose, qui te définit et qui te démarque des autres. Tu peux en faire ce que tu veux. C’est toi qui décides.

Est-ce que tu sais ce que tu veux faire avec ton talent de dessinateur ?

« Euh… non. J’suis pas un peu jeune pour savoir ça, moi ? Pour l’instant, les dessins que je dessine sont toujours des scènes de famille : moi, maman et… mon papa… »

Qu’est-ce qu’ils veulent dire selon toi ?

« Ben, j’crois que c’est assez clair, non ? J’en suis conscient, même si maman croit que non. J’ai jamais connu mon père. Il y a juste papy qui vient nous voir une fois par semaine. Je l’aime papy. Il joue avec moi aux jeux vidéos. C’est cool ! Maman a eu un chum pendant quelques mois. C’était son patron. Mais il était pas gentil avec moi. Il me parlait sur un ton bête, il était pas patient. Il m’aimait pas. Maman était pas contente, alors, elle l’a quitté.  »

Comment as-tu vécu cette rupture ?

« Euh… bien, j’imagine. Maman était pas heureuse avec lui de toutes façons. Maman, eh bien, des fois, je l’entends se réveiller la nuit en criant. Et elle pleure. Quand ça arrive, je vais la voir pour la consoler. Maman a peur de quelque chose ou de quelqu’un. Elle me l’a jamais dit. Mais moi, je le sens. Maman a vécu quelque chose dans son passé. J’ai jamais osé lui en parler. Mais je fais de mon mieux pour qu’elle se sente bien. Je l’aime, maman. C’est une super maman, elle m’a élevé toute seule. Je vois bien tout ce qu’elle fait pour moi. »

Merci, Cédrik, pour cette confidence. C’est touchant. Tu dois toi aussi être un bon fils. Vous deux, j’imagine, que vous avez un lien fort, n’est-ce pas ?

« Je sais pas trop ce que tu veux dire par lien fort. Mais maman et moi, on rit beaucoup. Même si des fois, on se chicane. Mais c’est normal, les chicanes, non ? »

Oui, oui, Cédrik, c’est normal.

Je veux savoir maintenant comment tu as vécu ton déménagement. Ça pas été trop difficile de t’éloigner de ta mamie vétérinaire et de la ville où tu es né ?

« Oui, être loin de mamie, j’aime pas ça. Elle me manque. Les animaux me manquent. Mamie m’a gardé tellement souvent ! Mais à l’école, le directeur voulait que je vois un psy. Et la psy me faisait peur avec ses yeux vides et froids, des yeux qui lui sortaient de la tête. Elle me faisait penser à Golum dans le Seigneur des anneaux. Moi, je voulais pas. J’ai supplié maman de changer d’école. Et on est venu vivre à Gentilly. Elle a acheté une boutique de fleurs. Ça, c’est vraiment cool ! Maman adore les fleur. Quand je veux lui faire plaisir, je lui dessine des fleurs que je trouve dans la pelouse : du pissenlit, des petites pensées sauvages, de la brunelle. Je connais leur nom parce que maman me l’a dit. Elle les connaît toutes, les fleurs sauvages. Elle les dessinait quand elle était toute petite. »

Est-ce que tu aimes vivre à Gentilly ? Comment c’est à l’école ? C’est mieux ?

« Oui. Je me suis fait une amie, Meredith Poirier. Elle est assise au même îlot que moi dans la classe. Elle a été gentille avec moi dès que je suis arrivé. On a jasé. Elle aime les mêmes jeux vidéos que moi, on aime le sport tous les deux, on aime aussi joué à des jeux de société. Elle, elle est deux ans plus jeune que moi, mais c’est une brillante. Elle m’aide avec les matières parce que moi, je suis pas très doué à l’école. Ce qui est drôle, c’est que sa mère était l’une des meilleures amies de ma mère quand elles étaient plus jeunes. Ça, c’est cool ! »

Cher Cédrik, ce fut un plaisir de discuter avec toi. Tu es un garçon étonnant. Je t’encourage à continuer le dessin. Il se pourrait que ton don soit plus important que tu ne le crois. Je te dirais de faire confiance à l’inspiration, à cette force invisible qui te guide dans tes créations. Peut-être tente-t-elle de t’enseigner quelque chose sur toi-même. Qu’est-ce que tu en penses ?

« Euh… En fait, pour le moment, je dessine, je tente pas de savoir d’où ça vient et pourquoi ça vient. Je préfère dessiner. Et, euh, c’était cool, l’entrevue ! »

Oui, c’est vrai, c’était super.

J’aurais une dernière petite question pour toi. Accepterais-tu de t’adresser à mes lecteur.trice.s par le biais de mon infolettre ?

Aurais-tu des choses à leur dire ?

« Écrire une lettre !!!! Je suis pas très bon en français, moi. J’aime pas trop écrire. Mais je peux demander à Meredith de m’aider. On pourrait ensemble trouver quelque chose à raconter à tes lecteur.trice.s. »

Oui, bonne idée, faites ça ! Ça va être chouette. Merci encore, Cédrik.

« De rien. Bye ! »


Voilà.

C’était super, cette rencontre avec Cédrik, n’est-ce pas ? Moi, même si j’ai déjà tout écrit l’histoire, cette entrevue m’a appris de nouvelles choses sur ce personnage. C’est chouette. C’est ça, la création littéraire. Ça ne se finit jamais ; on a toujours quelque chose de plus à apprendre.


Petite aparté pour les écrivain.e.s en herbe ou non. 

L’entrevue avec ses personnages est pour l’écrivain une technique d’investigation afin de mieux les comprendre, de mieux les connaître et découvrir des facettes qu’on ne voit pas toujours avec les fiches habituelles de personnage.

Mais pour véritablement connaître un personnage, il faut le voir agir dans une situation conflictuelle. C’est là qu’on voit ses réactions, qu’on ressent ses émotions, qu’on entend ses pensées. C’est là qu’on voit aussi les choix et les décisions qu’il prend.

C’est à force de le confronter à des situations difficiles que le personnage se développe sous nos yeux. Et cela se fait uniquement dans l’écriture de scènes, dans la rédaction de premier jet, puis par les nombreuses réécritures.


Si tu as envie de connaître ce que Meredith et Cédrik ont à te dire dans l’infolettre, je t’invite fortement à t’y inscrire. Le formulaire se trouve juste en dessous.

Merci d’être là et de me lire.

À très bientôt,

AnyJann xxx…


PRÉCOMMANDE de

Par amour pour Cédrik