Premier contact

MAHDIA

MAHDIA. Une onde délicate et forte me traverse le corps : je tremble. Profond émoi, intime, ébroue mes déchirures, me torture : une envie de tout foutre en l’air, me mettre à nu et tant pis. Colère contre cette vie, ses limites imposées et la souffrance qui s’étend au coin des rues inertes. Mais aussi, joie indicible aux mains avides de toucher, d’aimer, de plonger dans l’illusion providentielle. Peur au ventre crispé, ma tête se détracte ; je voudrais crier l’horreur. Mi-homme mi-extraterrestre, cet hίbrido sert les Kyars, les destructeurs d’âmes humaines, venus de la planète Kyarangh, et jouant avec nous, les humains. Il sert la terreur, le désespoir, la famine, les cris aux gorges sèches. Il sert tout ce que je répugne, mais en dépit du mal affleure un chemin presqu’irréel où pourrait s’éventer une liberté nouvelle.

MAKI

MAKI. D’ici, ses mains ressemblent à deux araignées dont les petites pattes récoltent les haricots. Cette humaine s’exécute avec un si grand empressement qu’on dirait une abeille assoiffée qui enfonce sa langue dans une fleur de figuier pour en boire le nectar. Dans sa posture, le corps penché en avant : dignité d’aurore au matin chaud. C’est comme être témoin de l’éclosion d’une première fleur de bougainvillier au printemps. C’est comme se ravir les yeux sur les pétales d’hibiscus aux embruns nocturnes. C’est comme s’éblouir devant la splendeur d’un nénuphar ensoleillé. C’est comme… s’imprégner de l’élan d’une louve nourricière.
  
Cette femme se donne à la vie, sans condition, le soleil caressant sa longue chevelure de roses moires qui scintillent, m’aveuglent. Dans cet éclair, l’humaine se déplie et me voit la regarder.
 
Mon souffle éperdu s’évanouit dans ses yeux ambrés. Jeté dans une braise ardente, je transpire. L’air manque, et mes deux cœurs s’arrêtent ; le monde explose, s’éparpille en morceaux noircis ; un son grave, constant, aux tonalités irréelles, expire ses notes immaculées sur les parois de ma vie, pénètre mes profondeurs, soulève les miasmes du passé, bouscule des vérités effilochées, les réduit en cendre.
 
Je ne suis rien.
 
J’ai si soif…